Opiniâtrement libre.
Chaque semaine, l’homme d’affaire Gilles
Bordonado gratifie les lecteurs de l’hebdomadaire dont il est propriétaire
d’une sorte d’éditorial, qu’il intitule “Libre opinion”.
Il faut rendre cette justice à Gilles
Bordonado, il n’a jamais prétendu être un journaliste, ni faire preuve
d’objectivité, ni d’impartialité. Cela lui serait d’ailleurs assez difficile,
eu égard aux gens très influents qu’il ne pourrait se permettre de mécontenter.
Ainsi, dans ce qu’il nomme un “article”, il
fait un éloge quasiment dithyrambique de l’équipe sortante de Terrebonne, si
bien assise et installée qu’elle semble indéboulonnable, indécollable.
Il souligne, ce qui est la stricte vérité,
que la lutte est inégale. Aucune opposition, qu’elle soit organisée,
indépendante ou d’apparence, ne pourrait compter sur des ressources et des
moyens comparables à ceux de l’équipe au pouvoir, c’est très évident. On ne
reste pas si longtemps en place sans avoir fait le tour de tous les tours.
Quand Gilles Bordonado dit qu’ils ont “l’expérience du pouvoir”, là encore, il
ne fait qu’énoncer une évidence (en forme d’euphémisme). La longueur d’avance
dont il parle est donc économique et stratégique. Dans les grandes longueurs.
Là où il dépasse son rôle de propriétaire
d’hebdomadaire d’annonces locales, dans lequel il tient tribune, c’est quand il
assure, après avoir dénigré l’opposition sans l’avoir vraiment prise en compte,
que “la grande majorité” de la population est satisfaite de l’équipe au
pouvoir, puisqu’on ne voit pas de mobilisation en masse. Rappelons que cette
équipe a été élue par environ un cinquième des électeurs inscrits, ce qui ne
constitue pas une légitimité écrasante, et que le parti qui gagne chaque
élection municipale depuis bien longtemps, c’est le parti abstentionniste. Trop
d’électeurs sont désabusés, écœurés, cyniques pour croire encore à la démocratie,
et ne se donnent même plus la peine de voter, ni de s’informer, ni surtout de
s’impliquer, trop convaincus que ça ne sert à rien de toute façon, que les
candidats sont tous les mêmes et qu’eux-mêmes, en tant que simples citoyens, ne
peuvent avoir aucune influence sur la façon dont ils seront tondus et rôtis.
C’est très préoccupant, car si l’on nie tout
à fait la démocratie, que reste-t-il ? Sous quelle sorte de régime
vivons-nous, dans les faits ? Je laisse chacun répondre à cette question
et choisir son destin.
Personnellement je préfère vivre ici et
maintenant, quelque imparfaite soit notre démocratie, que dans l’Espagne de
Franco ou le Chili de Pinochet. Je voudrais surtout que cette démocratie soit
plus qu’une apparence : un état d’esprit, une façon de fonctionner, fondée
sur le respect mutuel.
Quand Gilles Bordonado laisse entendre qu’il
est heureux que cette lutte soit inégale, il nie purement et simplement la
légitimité des élections démocratiques, ce qui est regrettable pour quelqu’un
qui a, malgré tout, plus de visibilité que le commun des mortels, grâce à
l’hebdomadaire d’annonces locales dans lequel il publie chaque semaine un
article – pardon, un éditorial – pardon, une libre opinion.
Contrairement à ce qu’ont dit et répété
certaines personnes oubliables, il est légitime de proposer une alternative,
sans se faire dire que les élections ça ne sert à rien et que les candidats
sont des clowns. Il est souhaitable de ne pas laisser des élus prendre racines
au point d’être indéracinables.
Je lui souhaite de conserver sa liberté
d’opinion, sa liberté d’expression, et je souhaite à tous de pouvoir exercer
eux aussi cette double liberté. - ♠
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2 commentaires:
L'éditorial auquel ce mot répond est ici :
http://www.larevue.qc.ca/chroniques_libre-opinion-n27479.php
Chers lecteurs et lectrices du blogue de Thibaud, je vous invite, si ça vous dit, de lire l'intégralité de mon texte pour vous faire une opinion plus juste de ce que j'ai écris. Cela sera éclairant pour vous. Cela vous permettra d'apprécier sous un jour nouveau l'interprétation toute personnelle de votre ami blogueur qui visiblement, lui, n'a aucun parti pris.
Comme journaliste depuis 25 ans et chroniqueur depuis 20 ans, je n'ai peut-être pas les talents poétiques de monsieur Thibaud Sallé Phelippes de La Marnierre, mais je crois malgré tout avoir un jugement assez juste de la politique locale, que cela ne plaise ou non à certains. On verra ce qu'il en sera dimanche. À vous de juger, mais prenez tout de même le temps de nous lire tous les deux avant de me préjuger. Au plaisir !
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