samedi 26 juillet 2014

PAS BLANC


QUI N’EST PAS BLANC EST NOIR

L’art de la nuance se perd. 

     Sans aller jusqu’à exiger que tout le monde sache rêver en couleurs, on pourrait espérer que les gens, en général, soient capable de concevoir les valeurs, c’est à dire les nuances de gris.
Cela semble de moins en moins fréquent. 

     J’ai toujours été surpris que la limite entre les humains “blancs” et “noirs” soit placée entre ceux qui sont 100% blancs et les autres. Ensuite, j’ai progressé, et je me suis demandé pourquoi il devait y avoir une limite ou une différence. 

     Ainsi, chaque fois qu’on évoque l’un des sujets qui fâchent, que ce soit la politique locale, la « charte des valeurs », les conflits – un, en particulier…- il semble de plus en plus difficile de trouver des interlocuteurs qui aient le sens des nuances. 

     La parole évangélique, ou bushienne, «Qui n’est pas [inconditionnellement] avec moi est contre moi», semble être la seule référence des gens qui s’expriment, à tort et DE travers. 

     Et ça me fâche. 

     Ça me désoblige, comme aurait dit tonton Georges.

     Que de sottises n’a-t-on pas lues et entendues lors de ce triste débat, complètement artificiel, au sujet des “accomodements raisonnables” (alors qu’il eût suffi de déterminer ce qui est déraisonnable), au sujet de la ‘laïcité”, qui a été pervertie pour en faire une pierre de touche à éliminer les “pas nous”, et maintenant au sujet de ce misérable conflit qui oppose l’État d’Israël et Gaza, ou plutôt quelques fanatiques dans les deux camps. 

     C’est tellement facile de se draper dans de nobles intentions et de prendre parti, quand on n’a pas à subir les conséquences de ses choix. 

     Le premier signe de cette infâme polarisation, c’est que ceux qui, de part et d’Autre ou nulle part, qui refusent de se laisser aller à cette solution de facilité qu’est le manichéisme se font copieusement honnir par les inconditionnels des deux bords. 

     Aux idées simplistes des petits soldats sans risques, opposons donc quelques idées simples. 

- Non, tout n’est pas forcément acceptable a priori. Un pays d’Accueil a le droit tout à fait légitime de tracer une ligne entre ce qui est permis et ne l’est pas. Immigré moi-même, je reconnais ce droit tant à  mon pays d’origine qu’à celui où je vis. Que l’on tempère ce droit en faisant référence à la déclaration universelle des droits de l’Homme, elle-même fortement inspirée par la première déclaration des droits de l’Homme, qui trouve sa source dans la philosophie des Lumières, soit. Il n’en reste pas moins que chaque État reste seul maître de ses propres lois, comme le démontre l’Arabie saoudite, qui ne prétend pas respecter la liberté de conscience ou de religion. C’est ainsi, que cela déplaise ou non. 

- Non, le traitement que subissent les arabophones musulmans en Palestine n’est pas acceptable, et il est souhaitable, pour tout le monde, que cela ait un terme. 

- Non, l’État d’Israël n’est pas illégitime, il a le droit d’exister, et ceux qui disent le contraire devraient réviser leur histoire et s’interroger sur leur bonne foi. 

     Malheureusement, chacun voit midi à sa porte, seulement. On ne fait pas droit à la vision d’autrui. La simplification des idées sévit à plein. Sacrifier les uns aux autres n’est jamais une bonne option, du moins si l’on adhère sincèrement aux principes qui, nés en France, ont été (en principe, justement…) adoptés par l’ensemble des pays de l’ONU. 

     Quand la sottise et l’égoïsme font loi, la loi est mauvaise. Et l’un des principes de cette fameuse déclaration, c’est que les peuples ont le droit de s’opposer aux lois injustes. On attend…
On attend des peuples d’occident qu’ils fassent la part des choses, et ne se rangent pas aveuglément derrière un camp, ou l’autre. 

     On attend des dirigeants de ces mêmes peuples, m ais aussi de tous les autres, qu’ils sachent refuser d’obéir à l’injustice. 

     On voudrait que les puissants ne prennent pas prétexte de la “démocratie” pour inposer un ordre mondial qui ne profite qu’au système financier international, et un peu à ceux qui en sont les collabos.
On voudrait que les dirigeants des pays dits émergeants, comme ceux des pays en voie de tiersmondialisation ou de sous-développement, se soucient plus du bien-être de leurs populations, et un peu moins de leur propre situations privilégiées. 

     On voudrait bien des choses en somme, mais le fait est qu’on ne va pas du tout dans ce sens-là.
Dans tous les pays, les intellectuels, les journalistes, les “humainitaires” sont l’objet de l’attention malveillante et soutenue de ceux qui décident du sort des gens et des choses. 

Certes, un peuple ignorant est plus docile, plus gouvernable, et je ne sous-estimerais pas la difficulté qu’il y a à gouverner, à quelque échelle qu’on se situe.

     Mais que dire de la qualité de ceux qui ont obtenu, par des moyens qu’il vaut mieux ne pas détailler, l’apparente légitimité qui leur permettrait de décider du sort de tous sans jamais avoir à rendre compte de rien ? Que dire du troupeau qui, fasciné par les divertissements futiles, les laissent faire en toute sérénité ? Les fautes, car elles sont nombreuses, sont assez partagées. 

     L’opinion publique, ou ce qu’il en reste, n’est pas monolithique. Ni en France, ni en Israël, ni  au Canada, ni dans les pays musulmans, pas même aux États Unis. Il y a des têtes qui dépassent, et c’est pourquoi on les coupe ou on les rabaisse. 

     J’ai coutume de dire que l’opinion publique se comporte comme un banc de harengs. Ce qu’on appelle en anglais, sans doute par antiphrase, “a school”. Tous tournent, vite et ensemble, dans une direction qu’ils n’ont pas choisie. C’est assez désespérant pour la suite des choses. 

     Le quotient intellectuel d’une foule serait, dit-on, le plus grand commun dénominateur de tous. Je n’y crois pas, à moins que l’on admette que l’ensemble raisonne seulement comme les débiles les plus profonds qu’on puisse trouver, auxquels on ne songerait pas à confier le sort de l’espèce.

     Heureusement j’ai dans mes relations quelques chiens qui ne font pas honte à leur espèce, et même quelques rares humains aussi.






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