lundi 15 novembre 2010

Bilan

Bilan de comptables

Depuis longtemps la presse écrite ou électronique nous assène qu’il faut que nous soyons lucides et que nous devons nous résigner à la disparition de l’État providence, qui serait devenu intenable.

Le fait que la grande majorité des organes d’information (ou de ce qu’on dit en être) appartiennent à des groupes financiers dont la seule raison d’être est de maximiser les profits n’est qu’une partie du problème. Göring le disait déjà, le meilleur outil de la propagande c’est la répétition.

Les idées droitistes perfusent dans toute a société, les slogans ressassés sont devenus des évidences, de celles qu’on accepte sans les examiner. La plupart des gens n’étant pas des économistes, et les économistes s’efforçant d’être le plus abscons possibles pour mettre les arcanes de leurs discipline hors de portée de la populace profane, nous sommes requis de croire sur parole la bonne parole financière.

Mais pourtant, la logique financière n’est pas la seule qui doive être prise en considération. À force de vouloir équilibrer les comptes (ou plutôt de les déséquilibrer dans un sens profitable), on finit par détruire le tissu social, par désorganiser l’organisme tout entier.

Bref, la pensée économiste est toxique.

Certaines suggestions venue de gauche (ou d’ailleurs) font hurler nos nouveaux prêtres de la religion financière. La taxe Tobin sur les mouvements de capitaux, le plafonnement des rémunérations – un salaire maximum répondant à un salaire minimum – pour n’en citer que deux. Mais n’étant pas un économiste, je ne dois pas prétendre parler de ce que je suis par définition incapable de comprendre. Les profanes doivent rester dehors.

La politique est nationale ou locale, tandis que l’économie est transnationale et globale. Je ne vois pas poindre l’espoir d’un gouvernement mondial, et je ne suis pas sûr que ce soit souhaitable. Plus les décideurs s’éloignent de ceux qui subissent leurs décisions, plus c’est dur de se faire entendre. Déjà que nos maires sont sourds…

La démocratie n’a jamais été qu’une apparence, en partie, et en partie une pratique. La démocratie représentative est l’art de faire croire aux gens qu’ils sont responsables de leur propre sort, ce en quoi elle rejoins le libéralisme économique. C’est rarement aussi simple.

De nos jours, même cette apparence semble être de trop.

Les décisions prises dépendent de moins en moins des électeurs, et ces électeurs commencent à s'en rendre compte. Ils ne votent plus parce qu’ils sont convaincus que cela ne sert à rien. Mais ce faisant, ils se résignent à ce que la démocratie soit encore moins concrète, encore plus une simple forme vide, et que les décisions qu’ils subissent se prendront toujours davantage lors de réunions à huis clos entre personnes qui comptent et savent compter, mais ne savent à peu près rien d’autre. Nous ne nous acheminons pas vers une dictature financière, nous y sommes depuis longtemps. Notre seul espoir c’est de limiter les dégâts.

Il faut reconnaître une qualité aux princes qui nous gouvernent et à leurs client, nos “élus” : ils sont réalistes et pragmatiques. Si les gens manifestent obstinément qu’ils acceptent la sujétion et l’exploitation jusqu’à un certain point seulement, ils sauront limiter un peu leur insatiable avidité plutôt que d’entretenir une armée pléthorique et coûteuse pour contraindre la populace.

Notre liberté ne peut se développer que dans les interstices, Si les dalles qui nous pèsent sont trop jointives, si notre organisation sociale est trop bétonnée, il ne restera plus aucune place pour la vie.

Si le bétail ne peut plus vivre, les prédateurs en souffriront. Moins vite, moins fort, mais en fin de compte, eux aussi finiront par regretter le bon vieux temps ou le nouvel opium du peuple – le consumérisme – tenait ledit peuple dans une saine euphorie pendant qu’on le tondait.

Il y a une limite à ce qu’on peut demander aux analgésiques.

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